Condition n°14
Le disciple ne doit pas rompre les liens qui l’unissent avec l’ensemble de la création.
Commentaire :
Après avoir su, à travers la douzième condition, que la Tarîqa Tijâniyya place comme principe obligatoire envers ses adeptes qu’ils se voient quotidiennement et jusqu’à la mort, nous abordons à travers cette quatorzième condition ce que ce mode de vie implique comme endurance et maintien indéfectible des liens de fraternité. Se rassembler physiquement et s’unir spirituellement pour Allâh est un axe majeur de l’Islam et, par conséquent, du cheminement vers Allâh.
Le Prophète ﷺ a dit : « Tu verras les croyants à travers leur bonté, leur affection et leur attachement réciproque, constituer un seul corps : quand l’un des membres souffre, il transmet sa fièvre et son insomnie à tout son corps. »
قال رسول الله ﷺ: تَرَى الْمُؤْمِنِينَ فِي تَرَاحُمِهِمْ وَتَوَادِّهِمْ وَتَعَاطُفِهِمْ كَمَثَلِ الْجَسَدِ إِذَا اشْتَكَى عُضْوًا تَدَاعَى لَهُ سَائِرُ جَسَدِهِ بِالسَّهَرِ وَالْحُمَّى
Comprendre son statut d’organe et chercher à se lier avec d’autres organes pour former le corps, c’est cela que l’on appelle La Communauté de l’Islam. Il n’y a pas de chemin vers Allâh, de force physique ni spirituelle autrement que par le lien que le musulman a avec son frère et que la musulmane a avec sa sœur. Les bienfaits, les faveurs, les mérites et les grâces de cette union à travers et autour de l’amour du Prophète ﷺ constituent le cœur et le noyau du cheminement de chaque aspirant.
D’après Aboû d-Dardâ’ رضي الله تعالى عنه, le Prophète ﷺ a dit : « Le jour de la résurrection venu, Allah va certes ressusciter des gens qui auront une lumière sur leurs visages. Ils seront sur des minbars de pierres précieuses. Les gens les envieront bien qu’ils ne soient ni des prophètes ni des martyrs. »
Un bédouin tomba à genoux et dit : « Ô Messager d’Allâh ! Décris-les-nous afin que nous les reconnaissions. »
Le Prophète ﷺ a dit : « Ce sont ceux qui s’aiment pour Allâh. Ils sont de tribus différentes, de régions différentes ; ils se réunissent pour se rappeler d’Allâh. »
عن أبي الدرداء رضي الله عنه قال رسول الله صلى الله عليه وسلم : ليبعثن الله أقواما يوم القيامة في وجوههم النور على منابر اللؤلؤ يغبطهم الناس ليسوا بأنبياء ولا شهداء
فجثا أعرابي على ركبتيه فقال : يا رسول الله حلهم لنا نعرفهم
قال رسول الله صلى الله عليه وسلم : هم المتحابون في الله من قبائل شتى وبلاد شتى يجتمعون على ذكر الله يذكرونه
Ayant parfaitement conscience de cela, Iblîs le maudit accordera une attention particulière à ces croyants qui s’unissent dans le rappel d’Allâh. Iblîs, lui qui a promis de corrompre n’importe qui emprunterait la voie menant vers Allâh :
قَالَ فَبِمَا أَغْوَيْتَنِي لأَقْعُدَنَّ لَهُمْ صِرَاطَكَ الْمُسْتَقِيمَ
ثُمَّ لآتِيَنَّهُم مِّن بَيْنِ أَيْدِيهِمْ وَمِنْ خَلْفِهِمْ وَعَنْ أَيْمَانِهِمْ وَعَن شَمَآئِلِهِمْ وَلاَ تَجِدُ أَكْثَرَهُمْ شَاكِرِينَ
« Il dit : par le fait que Tu m’aies mis en déroute, je m’assoirai pour qu’ils me trouvent sur Ton Droit Chemin, puis je les assaillirai de devant, de derrière, de leur droite et de leur gauche. Et, pour la plupart, Tu ne les trouveras pas reconnaissants. » [Al-A`râf/ 16]
Concernant Sa parole : «فَبِمَا أَغْوَيْتَنِي لأَقْعُدَنَّ » (par le fait que Tu m’aies mis en déroute, je m’assoirai), l’exégète Aboû Hayyân al-Andalousî a dit, après avoir exprimé le sens apparent du « بـــ » (par) comme étant le fait de prêter serment : « Son sens implicite est : par le fait que Tu m’aies mis en déroute, je fais le serment par Allâh que je m’assoirai… ». Il n’a pas pris une simple résolution, il a pris l’engagement auprès d’Allâh par un serment authentique. Quant à Sa parole : « صِرَاطَكَ الْمُسْتَقِيمَ » (Ton Droit Chemin), elle indique que celui qui emprunte une voie d’égarement qui ne le mènera jamais vers son Seigneur n’y trouvera pas le Chaytân. Seuls le trouveront sur leur route ceux qui se placeront sur le Droit Chemin d’Allâh. C’est à leur sujet qu’Iblîs a prêté serment. A la manière dont les hommes d’Allâh prennent des gens par la main pour les faire parcourir ce Droit Chemin, Iblîs forme ses troupes malfaisantes pour qu’elles deviennent des armées leur faisant obstacle. Chaque personne mettant un pied sur ce Droit Chemin sera alors en guerre contre lui, maudit soit-il.
Ces manifestations du complot de Chaytân ont été observable à l’époque du Prophète ﷺ entre les compagnons , qui étaient l’élite de ceux qui foulèrent le Droit Chemin. Chaytân cherchait par tous les moyens à corrompre leur relations, à l’image du jour où le Prophète ﷺ était sorti pour informer les gens de la date annuelle de Laylat al-Qadr, mais qu’une querelle se produisit entre deux compagnons. Il dit ﷺ : « Je suis sorti pour vous informer de Laylat al-Qadr, mais comme untel et untel se sont querellés, cela a été enlevé. »
Les incompréhensions et les disputent peuvent surgir au sein des groupes qui se sont liés à travers Allâh pour tous avancer vers Lui. Elles proviennent du travail acharné d’Iblîs pour les faire échouer, conformément à son serment. C’est pour cela que le Prophète ﷺ, conscient de ce qui peut survenir comme désordre entre ces « compagnons de route », a prodigué un conseil primordial pour faire échouer ces projets de divisons. D’après Hichâm ibn `Âmir رضي الله تعالى عنه, le Prophète ﷺ a dit « Il n’est pas permis de rompre les liens au-delà de trois jours. Si les liens sont rompus au-delà de trois jours, les deux personnes ne se rassembleront jamais dans le paradis. Les péchés de celui des deux qui revient vers son compagnon sont pardonnés. Si l’un a passé le salâm et que l’autre n’a pas répondu et n’a pas accepté son salâm alors un ange lui répond et un Chaytân répond à l’autre. »
عن هشام بن عامر رضي الله عنه قال رسول الله صلى الله عليه وسلم : لا يحل أن يصطرما فوق ثلاث فإن اصطرما فوق ثلاث لم يجتمعا في الجنة أبدا وأيهما بدأ صاحبه كفرت ذنوبه وإن هو سلم فلم يرد عليه ولم يقبل سلامه رد عليه الملك ورد على ذلك الشيطان
Si l’on observe ce hadîth, on y trouvera, certes, ce qui permet d’endiguer le fléau de la discorde entre les musulmans :
« Il n’est pas permis de rompre les liens au-delà de trois jours… »
Il est donc possible que des incompréhensions répétées amènent deux des membres de la communauté ou plus à être en froid, Chaytân agressant les uns et les autres pour faire perdurer cette situation dramatique. Chacun doit alors surmonter les insufflations de Chaytân pour retourner vers l’autre. En cas de difficulté à surmonter cette situation, chacun dispose d’un délai de trois jours pour se ressaisir, se tourner vers son Seigneur, se repentir et invoquer afin qu’Allâh ramène en lui la quiétude et la tranquillité pour qu’il puisse pardonner et demander pardon à ses coreligionnaires.
« Si les liens sont rompus au-delà de trois jours, les deux personnes ne se rassembleront jamais dans le paradis… »
C’est-à-dire, s’il ne se repentent pas. En effet, celui qui n’est pas lié à l’autre dans ce bas monde ne sera pas lié à lui dans l’au-delà.
« Les péchés de celui des deux qui revient vers son compagnon sont pardonnés… »
Le fait de revenir exprime la cessation des hostilités. Ainsi, lorsque deux membres de la communauté sont en froid à cause d’une incompréhension ou d’une mésentente, le premier des deux qui revient vers l’autre pour arranger la situation verra ses péchés pardonnés, même s’il était responsable de la situation. Ce comportement béni indique une domination de l’ego, une victoire contre Chaytân et a pour effet de faire mériter la satisfaction d’Allâh.
« Si l’un a passé le salâm et que l’autre n’a pas répondu et n’a pas accepté son salâm alors un ange répond à l’un et Chaytân répond à l’autre. »
C’est-à-dire qu’un ange répond à celui qui a adressé le salâm, et Chaytân répond à celui qui a refusé le salâm de l’autre. Celui qui a tenté de résoudre la situation recevra les faveurs divines, et celui qui a refusé cela se fera du tort à lui-même, car à travers cet acte, il aura pris le parti de Chaytân. Puisse Allâh nous en préserver.
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Le disciple faisant route sur le Droit Chemin doit s’armer de patience, d’endurance et de détermination pour supporter les défauts des musulmans, avec amour et compassion, de la même manière qu’il se doit de persévérer pour réformer ses propres défauts.
Qu’Allâh nous donne la victoire totale