Mou`âdh Ibn Jabal رضي الله تعالى عنه a été envoyé par le Prophète صلى الله عليه وسلم au Yémen. Avant qu’il ne parte, le Prophète صلى الله عليه وسلم lui a dit : « Bien heureux est le messager du Messager d’Allâh. » Or, le Prophète صلى الله عليه وسلم n’a pas donné ce statut à tout le monde, le statut d’être le Représentant du Prophète auprès d’un groupe de personnes. C’est cela le sens de la parole du Prophète صلى الله عليه وسلم : « Celui qui obéit à mon Amîr m’a obéit, et celui qui désobéit à mon Amîr m’a désobéit. » Le amîr (littéralement : « celui qui ordonne ») étant celui à qui le Prophète a confié la gestion d’un groupe de personnes. C’est ainsi qu’aujourd’hui, à travers le Chaykh, nous pouvons vivre comme les compagnons vivaient avec le Prophète صلى الله عليه وسلم, car il n’a pas limité cette parole pour son époque. 

Prendre l’engagement dans une Tarîqah avec un Chaykh n’est donc pas un acte répréhensible, il fait au contraire  parti de la Sunna du Prophète. Car celui qui prend l’engagement avec un Chaykh le prend en réalité avec le Prophète صلى الله عليه وسلم.

 

Le Sens de la Bay`ah

Lbay`ah ou `ahd (gage, vœu) dans la langue arabe signifie l’adhésion à quelque chose.

Et dans la charî`ah, cela signifie l’adhésion à un acte religieux, telle que l’adhésion des Ansâr à la défense du Prophète صلى الله عليه وسلم, de la même manière qu’ils auraient défendu leurs femmes et leurs enfants. 

 

L’origine textuelle de la bay`ah provient de la parole d’Allâh سبحانه و تعالى : « Ceux qui te prêtent serment d’allégeance (youbâyi`oûn) ne font que prêter serment à Allâh : la Main d’Allâh est au-dessus de leurs mains. Quiconque viole le serment ne le viole qu’à son propre détriment ; et quiconque remplit son engagement envers Allâh, Il lui apportera bientôt une énorme récompense. » [Al-Fath /10]

Ainsi que Sa parole سبحانه و تعالى : « Ô Prophète ! Quand les croyantes viennent te prêter serment d’allégeance, [et en jurent] qu’elles n’associeront rien à Allah, qu’elles ne voleront pas, qu’elles ne se livreront pas à l’adultère, qu’elles ne tueront pas leurs propres enfants, qu’elles ne commettront aucune infamie ni avec leurs mains ni avec leurs pieds et qu’elles ne désobéiront pas en ce qui est convenable, alors reçois leur serment d’allégeance, et implore d’Allâh le pardon pour elles. Allâh est certes Pardonneur et Miséricordieux. » [Al-Moumtahanah / 12]

L’Imam at-Tahanawiyy al-Hindiyy a dit dans son commentaire de ce noble verset : « Ce verset montre clairement ce qu’est la bay’a, et il montre que toute  bay’a prise sans mettre l’intention de travailler dans son sens et d’y être fidèle est nulle. »

La Bay`ah est pour tous les musulmans

Le Prophète صلى الله عليه وسلم prenait l’engagement de la part de ses Compagnons, individuellement ou en groupe, hommes ou femmes, vieux ou jeunes, comme le confirme le verset précité. Et les Compagnons pouvaient ainsi le renouveler à plusieurs reprises. 

Parmi ce qui a été  rapporté sur l’engagement pris en groupe,  notre maître `Awf ibn Mâlik رضي الله تعالى عنه  a dit : « Nous nous trouvions auprès du Messager d’ Allâh صلى الله عليه وسلم, au nombre de neuf, huit ou sept d’entre nous. Il صلى الله عليه وسلم dit : « Ne prêterez-vous pas allégeance au Messager d’Allâh ? » Nous venions juste de lui prêter allégeance, nous avons donc dit : « Nous t’avons déjà prêté allégeance, ô Messager d’ Allâh ! » Il dit : « Ne prêterez-vous pas allégeance au Messager d’Allâh ? » Nous avons alors étendu nos bras et nous dîmes : « Nous te prêterons allégeance, ô Messager de Allâh ! Et dans quel but prêterons-nous allégeance ? » Il dit : « Adorer Allâh, sans rien Lui associer, et effectuer les cinq prières quotidiennes, entendre et obéir », puis il ajouta à voix basse : « et ne rien demander à personne. » C’est alors que j’ai constaté que certains d’entre eux ne demandaient à personne de ramasser leur cravache lorsqu’elle tombait par terre. »
[Rapporté par Mouslim, Aboû Dâwoud et An-Nasâ’iyy]

Ce hadîth démontre que les Compagnons respectaient scrupuleusement leur pacte, au point qu’ils ne voulaient pas demander à quiconque de leur remettre leur cravache, malgré l’insignifiance apparente de cela.  

De même : `Oubâdah ibn as–Sâmit, qui a pris part à la Bataille de Badr et était l’un des chefs des Ansâr, rapporte que le Messager d’ Allâh صلى الله عليه وسلم, dit à un groupe de Compagnons qui se trouvaient auprès de lui : « Prêtez-moi serment de ne rien associer à Allâh, de ne pas voler, de ne pas commettre l’adultère, de ne pas attenter à la vie de vos enfants, de ne pas fomenter une fausse accusation d’adultère que vous auriez forgée vous-mêmes et de ne pas être désobéissants . Ceux d’entre vous qui s’y conforment seront récompensés par Allâh. Ceux d’entre vous qui choient à ces conditions et sont châtiés dans cette vie, ce sera pour eux une expiation. Quiconque choit à ces règles et qu’Allâh le dissimule, sa rétribution revient à Allâh. S’Il veut, Il lui pardonne, s’Il veut, Il le châtie. » `Oubâdah dit : « Nous lui prêtâmes serment en ces conditions.« 

Cette bay`ah n’est donc pas la bay`ah de l’entrée en Islam, ni celle du jihâd, parce que ceux qui se sont engagés étaient déjà musulmans, mais c’est la bay`ahdu repentir, qui consiste à pratiquer l’Islam dans sa profondeur.  

Chaykh Ahmad ibn `Abd ar-Rahîm a expliqué la réalité de la bay`ah dans son ouvrage Al-Qawl al-Jamîl, commentant le verset précité de la sourate al-Fath : « Il y a une grand nombre de récits rapportés sur le Messager d’Allâh صلى الله عليه وسلم que les gens lui faisaient bay`ah, parfois pour la hijrah, parfois pour le jihâd, parfois pour effectuer les piliers de l’Islam, parfois pour tenir bon dans la bataille, parfois pour s’accrocher fermement à la Sounnah, éviter l’innovation, et toujours s’assurer de faire les actes d’obéissance. Et il a également été authentiquement rapporté qu’Il fit bay`ah aux femmes de la tribu des Ansâr de ne pas pleurer à haute voix sur les morts. »

De même, beaucoup de compagnons qui vivaient loin de Médine avaient l’habitude de venir à lui صلى الله عليه وسلم, passer des jours en sa compagnie, apprendre tout ce qu’ils pouvaient dans les questions de leur religion, puis faire la bay`ah et de retourner dans leurs foyers.

Prendre l’engagement auprès d’un Chaykh en lui prêtant serment d’allégeance n’a d’autre but qu’imiter les Compagnons dans le renouvellement de leur bay`ah auprès du Prophète. C’est prendre un engagement supplémentaire de redoubler d’efforts dans l’adoration d’Allâh et dans la mission de l’Islam.